Devenu animateur d’émissions de variétés, “le gendre idéal” de l’audiovisuel a longtemps eu du mal à se définir.

Quand on l’interrogeait sur ses origines, Michel Drucker expliquait d’abord qu’il était normand, puis plus tard d’origine roumaine. Il est devenu ensuite ashkénaze. Depuis quelques années, il revendique clairement son judaïsme.

Michel Drucker explique : ”Avec un père qui s’appelle Abraham Drucker et une mère qui s’appelle Lola Schafler, c’est difficile de cacher sa judéité. Je suis Juif et je le resterai toute ma vie.

Quand on a un père qui pendant la dernière guerre a été dénoncé et contraint de porter ­l’étoile jaune, comment ne pas être Juif jusqu’au bout des ongles? Nous étions Juifs, même si on n’allait pas à la Synagogue, on ne fêtait pas Kippour et on n’a pas été élevés dans la tradition religieuse juive.

Je crois que je suis de plus en plus Juif. Pour preuve : j’ai de plus en plus envie d’aller découvrir mes racines identitaires dans la ville où mes parents ont grandi, Czerno­witz, en Ukraine. Il faut absolument que je fasse ce voyage. J’ai toujours redouté d’y aller. Je n’ai pas encore eu non plus le courage d’aller à Auschwitz, mais je le ferai un jour.”

Le père de Michel Drucker est originaire de Davideni prés de Czernowitz. Aujourd’hui, cette ancienne ville de l’empire austro-hongrois est en Ukraine.

Abraham Drucker, après avoir étudié la médecine à Bucarest arrive en France en 1925. Il épouse Lola Schafler. Les Drucker ne parlent pratiquement pas français mais s’expriment en yiddish, roumain et allemand.

En 1942, l’année de la naissance de Michel Drucker, son père est arrêté par la Gestapo après avoir été dénoncé. Peut -être par un paysan, peut-être par un confrère jaloux.

Abraham Drucker passe trente-six mois de captivité dans les camps d’internement de Drancy et de Compiègne. Comme il est médecin et qu’il parle couramment l’allemand, les nazis considèrent qu’il sera très utile. Alois Brunner, le chef du camp de Drancy le prend aussi à Nice, où les juifs sont parqués à Hotel Excelsior avant d’être déportés à Auschwitz. Abraham Drucker est libéré le 17 août 1944 quand s’ouvrent les portes du camp de Drancy.

Après la Guerre, Abraham Drucker s’installe en Basse-Normandie. Il décide de baptiser au catholicisme ses trois fils, résolument convaincu que ça les aiderait à s’intégrer entièrement à la société française.

Michel Drucker et ses frères grandissent dans “une famille avec son lot d’inquiétude et d’inaptitude au bonheur ».

Le mari de Dany Saval confie : “Tous les ashkénazes qui ont connu la Shoah ont gardé ça en eux jusqu’à maintenant. Dans cette diaspora, il y avait deux sortes d’inquiétude : silencieuse et bruyante. Mon père était un grand angoissé, caractériel, colérique, impatient, sonore. Ma mère était le contraire. À la maison, on vivait dans un climat électrique. Mon père avait de la patience pour ses malades mais pas avec ses propres enfants. Il voulait que l’on réussisse à tout prix. C’était obsédant. Quant à sa captivité, il n’en parlait presque jamais. La plupart des rescapés des camps ou ceux qui y ont échappé n’aiment pas en parler. Soit parce que les douleurs sont encore là, soit par culpabilité d’avoir sauvé leur peau alors que les autres n’en sont pas revenus”.

Pour Lola Drucker, le baptême de ses trois enfants est un drame. Son frère a fait son alyah avant l’indépendance d’Israël. Abraham avait aussi une sœur là-bas, mais la vie au kibboutz était dure pour une femme de 50 ans. Elle est morte de chaleur et d’épuisement.

Lola Drucker est plus attachée à ses racines que son mari. Elle collectionne les articles de Jean Daniel sur le Proche-Orient. Quand elle vient habiter à Paris, elle va chaque semaine rue des Rosiers pour faire ses courses chez Goldenberg pour y acheter le gefilte fish, la carpe farcie ou le struddle. Et puis, il y a le yiddish à la maison. On écoute des disques. Abraham joue du violon et sa femme de la mandoline.

Michel Drucker affirme avec force que ses origines juives ont toujours été présentes « comme une petite musique ».

Parrain de la Tsedaka en 2014, il raconte : « J’arrive sur scène, et là, tout le Palais des Congrès se lève. Je suis bouleversé, et là subitement, je pense à ma mère, je pense à la rue des Rosiers, je pense à Goldenberg, je pense à Lola Drucker, je me lance dans un discours improvisé et je sens ma mère qui me dit ‘mais finalement tu as fait Vivement Dimanche pourquoi ne fais-tu pas Vivement Shabbat? »