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LA LAÏCITE D'ISRAËL REMISE EN QUESTION PAR UNE NOUVELLE GUERRE DES JUIFS

Source : i24news.tv en ligne le dimanche 16 août 2015

 

 

 

 

 

Résultat de recherche d'images pour "Juifs ultra-orthodoxes à Jérusalem"

Jérusalem:

les traditionnelles "guerres d'été"

de la ville sainte (analyse)

 

Les laïcs vont gagner la bataille du Yes Planet , mais il est peu probable qu'ils gagnent la guerre du Shabbat

 

 

En fin de semaine, les manifestations du samedi étaient de retour à Jérusalem.

Des extrémistes du courant juif ultra-orthodoxe antisioniste ont provoqué des émeutes et jeté des pierres, en raison de l’ouverture d’un nouveau cinéma Yes Planet durant le Shabbat (jour sacré du samedi pour les Juifs, ndlr).

En réalité, cela se passe comme ça tous les étés dans la ville sainte de Jérusalem. Il y a de la pastèque avec de la feta, certains vont à la plage de Tel Aviv ou d’Ashdod, mais il y a aussi des manifestations de Shabbat des extrémistes juifs ultra-orthodoxes.

Et la tradition est respectée: les extrémistes lancent des pierres sur la police et les automobilistes, ainsi que des couches usagées pour bébés en traitant la police de nazis puis, à la fin du Shabbat (qui se termine après l’apparition de trois étoiles), ils incendient même les poubelles.

Quant aux raisons de cette longue tradition, les avis sont partagés. Il y a ceux qui affirment que les journées d’été sont trop longues, d’autres prétendent que ces manifestations sont nécessaires pour recueillir des dons au profit de la dynastie antisioniste hassidique de Satmar aux Etats-Unis. D’autres encore pensent que ces extrémistes ultra-orthodoxes cherchent tout simplement à repousser les limites de leur quartier dans lequel la circulation automobile est interdite durant le Shabbat. En effet, la plupart des quartiers ultra-orthodoxes du nord de Jérusalem sont fermés par des barrières, pour empêcher les voitures de passer. Ce qui est certain c’est qu’en hiver, les extrémistes manifestent beaucoup moins puisqu’il fait froid et il pleut.

Telle est la réalité dans la ville sainte, des luttes incessantes entre les religions et au sein de chacune d’entre elles. Les guerres de religion dans la partie juive de la ville portent sur l’observance du Shabbat. En d’autres termes, combien d’espaces culturels et de divertissement seront ouverts pendant le Shabbat et quelles sont les frontières du quartier ultra-orthodoxe, interdit à la circulation. Mais cette fois, les manifestations du Shabbat ont tardé à venir.

Ainsi donc, cette année, le prétexte est l’ouverture d’un complexe de cinéma Yes Planet dans le sud de la ville, où 16 salles seront ouvertes au public pendant le Shabbat.

L’ouverture du cinéma pendant Shabbat est-elle un phénomène nouveau ? Tout dépend de la façon dont on perçoit les choses.

Revenons tout d’abord en arrière. En Israël, la plupart des commerces, y compris les centres culturels et lieux de divertissements, sont fermés pendant le Shabbat. Dans certains des cas, ils restent fermés parce que les propriétaires observent le Shabbat, dans d’autres, c’est lié à la limitation par la loi de la durée du temps de travail. Et pour d’autres encore la raison est l’attribution par le Grand-Rabbinat d’un certificat de Cacherout (code de conformité à l’observance du Shabbat et des lois alimentaires juives, ndlr) uniquement aux restaurants et commerces de bouche qui observent le Shabbat.

D’après une étude réalisée par l’association Coalition Yerou-shalem et l’Institut de Jérusalem d’études sur Israël, 165 commerces, centres culturels et de divertissement, ainsi que restaurants de Jérusalem-ouest sont ouverts pendant Shabbat (les commerces de l’est de la ville dont les habitants sont pour la plupart musulmans ou chrétiens sont ouverts le samedi, mais les Juifs craignent de s’y rendre pour des raisons de sécurité).

Ces 165 commerces ouverts le samedi font de Jérusalem l’une des villes les plus actives d’Israël pendant le week-end. Pourtant, l’image de la ville aux yeux des Israéliens et des habitants de la ville est très différente. Ils l’imaginent comme une forteresse extrémiste et barricadée. On ne sait ce qui est plus fort ; les nombreux lieux ouverts le samedi ou simplement l’imagination.

Les commerces ouverts sont concentrés dans des lieux isolés, tandis que les rues des quartiers juifs restent vides de passants et de véhicules durant le Shabbat. Pour les religieux, il s’agit de l’atmosphère du Shabbat sacré.Aux yeux de la plupart des laïcs, cela représente le vide ainsi qu’un manque de vie.

En réalité, il n’y a rien de nouveau dans l’ouverture du complexe Yes Planet. Aujourd’hui, il existe déjà 13 salles de cinéma ouvertes durant le Shabbat dans la ville sainte. En outre, l’espace Yes Planet a été construit dans le sud de la ville, loin des quartiers juifs orthodoxes. Alors pourquoi ce débat ? Pour la sainteté de la ville et son contrôle. D’un point de vue orthodoxe, plus il y a des activités pendant Shabbat, moins la ville est sainte.

Selon la loi fondamentale des guerres de religion et du Shabbat en Israël on ne peut vaincre que dans les guerres liées à ses propres quartiers. Les ultra-orthodoxes gagnent leur guerre pour l’interdiction de la circulation de véhicules pendant le Shabbat car les automobilistes ont peur de conduire là-bas.Les laïcs gagnent leur guerre pour l’ouverture de commerces pendant le Shabbat puisque les religieux ne conduisent pas le samedi et ont par conséquent des difficultés à aller manifester là-bas et perturber le cours des activités.

Ainsi, ils manifestent dans leurs propres quartiers jusqu’à ce qu’ils se lassent. Parfois, les extrémistes ultra-orthodoxes parviennent à impliquer dans leur lutte les partis politiques religieux membres du gouvernement et provoquent des crises politiques. Néanmoins, Yes Planet est un lieu privé. Les politiciens n’ont pas la capacité de le fermer.

Par conséquent, comme pour la plupart des conflits de ces trente dernières années concernant l’ouverture de commerces pendant Shabbat, il est probable que les laïcs gagnent la bataille de Yes Planet.

En revanche, ce n’est pas sûr qu’ils gagnent la guerre. Chaque combat renforce l’image de Jérusalem comme étant une ville extrémiste et sombre, éloignant les laïcs.

Tous les laïcs savent que leurs enfants ont très peu de chances de vivre dans la ville, où le prix des logements est très élevé, où il est très difficile de trouver un emploi et où la tension est si élevée. La question reste à savoir si dans 20 ans il y restera encore une population juive laïque significative à Jérusalem et si les commerces qui sont aujourd’hui ouverts ne seront pas contraints de fermer par manque de clients.

Et si je n’affirme pas tout simplement qu’il ne restera pas de laïcs, c’est parce que l’histoire est un domaine complexe avec des tournants et des revirements, en particulier lorsqu’il s’agit de l’histoire de Jérusalem.

Shahar Ilan est vice-président de l’association Hiddush pour la liberté religieuse et l’égalité, et fut rédacteur en chef du journal local de Jérusalem Kol Haïr.

 



16/08/2015
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