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RESOLUTION DES DEPUTES FRANCAIS POUR LA CREATION D'ETAT PALESTINIEN : UN ANCIEN AMBASSADEUR D'ISRAËL EN FRANCE DETRICOTE LE GROS MAILLON D'ELISABETH GUIGOU

Source : i24newstv en ligne le mardi 2 décembre 2014

 

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Analyse: le vote français de la frustration

 

 

La reconnaissance de l'Etat palestinien est une tendance qui va se poursuivre et isoler totalement Israël

 

La France s’est ajoutée à la liste des pays ayant fait une déclaration claire envers la solution à deux Etats. Son parlement, l'Assemblée nationale, a adopté par une large majorité - 339 voix pour et 151 contre - une résolution invitant le gouvernement à reconnaître un Etat palestinien aux côtés de l'Etat d'Israël. Le texte détaillé de la résolution met un accent particulier sur le fait que cette reconnaissance doit être accompagnée par la reprise du processus de paix et servir de catalyseur pour relancer les négociations. Le langage utilisé souligne la nécessité d'un accord négocié entre les deux parties, le droit des Palestiniens à un Etat et le droit fondamental d'Israël à vivre dans des frontières sûres, soit les piliers bien connus de la politique étrangère française depuis des décennies et de nombreuses présidences.

 

Israël pourrait de nouveau réagir à cet événement avec un haussement d'épaules afin de minimiser son impact, arguant, comme il l'a fait dans les cas du Royaume-Uni et de l'Espagne, que ce ne sont que des cas isolés et qu'ils ont une valeur essentiellement symbolique. Ce serait vrai, mais un peu naïf. Ça commence davantage à ressembler à une éruption de cas isolés, surtout si vous les ajoutez au fait que près de 135 pays (une confortable majorité des membres de l'ONU) ont déjà pleinement reconnu l'Etat virtuel de Palestine. La bataille diplomatique menée aujourd'hui par les diplomates israélien se concentre presque entièrement autour de ce qui est appelé par certains (avec une dose de “politiquement incorrect”) “la majorité morale”, soit la majorité des pays d'Europe occidentale et d’Amérique du Nord.

Le cas de la France est pourtant différent. Le discours du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius à l'ouverture du débat peut être interprété comme une indication du degré de collaboration et de connivence qui prévaut entre la majorité socialiste à l'Assemblée et le gouvernement. Fabius a énoncé une initiative française pour relancer le processus de paix, qui commence par une résolution au Conseil de sécurité des Nations unies, parrainée ou éventuellement même introduite par la France. L’initiative appelle ensuite à une conférence internationale de paix, la fixation d'un délai de deux ans pour les négociations et se termine en promettant que si ces négociations devaient échouer, la France reconnaîtrait unilatéralement la Palestine. Ainsi, Fabius, connu pour être fortement tenté par la reconnaissance immédiate mais freiné par les contraintes politiques et diplomatiques, reporte la date tout en prenant un engagement clair, faisant de la France le premier grand membre de l'Union européenne (UE) à le faire.

Certains prétendent que cette initiative est une tentative de rectifier ce que des socialistes ont considéré comme un biais pro-Israël pendant la guerre de cet été entre Israël et le Hamas. Le président François Hollande a ensuite été critiqué pour ses déclarations en faveur du droit d'Israël à se défendre et a même été accusé d'avoir alimenté les troubles dans les rues de Paris et les vives critiques du gouvernement.

On pourrait aussi l'interpréter comme une énième tentative de la France de faire preuve de leadership dans les affaires du Moyen-Orient, ce qu’elle a déjà tenté à de nombreuses reprises au cours des dernières décennies. Pourquoi serait-elle couronnée de succès davantage que les autres fois? Elle ne le sera probablement pas, à moins bien sûr qu’il s’avère que la démarche française ait la bénédiction du président Obama et que l'administration américaine prépare une surprise à Israël au Conseil de sécurité. Priver le gouvernement Netanyahou du traditionnel veto américain pourrait s’avérer plus facile si la résolution n’était pas introduite par un état membre arabe, mais par la France et peut-être par d'autres membres de l'UE.

Nicolas Sarkozy, qui prépare son retour dans la course à la présidence française de 2017, a tenté de ramener le vote à l'Assemblée nationale dans le champ de la politique française. Dans une longue interview au quotidien Le Figaro la semaine dernière, il a sévèrement critiqué le président Hollande et son parti pour l'introduction de la résolution "en ce moment particulièrement sensible" et a exhorté ses collègue de l’UMP à voter contre elle.

Il s’est avéré que la plupart d'entre eux, bien qu’ils n’ont pas voté en faveur, ont préféré s’absenter pendant le vote. Avec tout le respect qu’on doit à Sarkozy, ils ont probablement estimé que ce n’était pas une bonne idée de se présenter dans la prochaine campagne électorale avec à leur actif un vote contre la création d'un Etat palestinien.

Comme dans les autres cas similaires à travers l'Europe, le vote pour la reconnaissance d'une Palestine inexistante est un geste facile et très populaire qui se réalise à peu de frais. Après tout, il n’aura pas d'impact véritable sur les réalités du terrain. Plus que tout, avec le processus de paix au point mort, c’est l'expression de la frustration mélangée à l’impatience que l’on retrouve de plus en plus chez les gouvernements et les opinions publiques du monde entier. Le vide diplomatique se remplit donc d'initiatives extérieures, dont certaines purement symboliques et d’autres avec plus de substance. La tendance continuera sans aucun doute, laissant Israël de plus en plus isolé, jusqu'à ce que les parties retrouvent le chemin de retour à la table de négociation.

 

Daniel Shek est consultant indépendant et ancien ambassadeur d’Israël en France.



02/12/2014
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